Myopicide & Ontalgocure

Ah! Vous voulez rendre célèbre mon élixir? Bien le merci. Pour avoir ensuite des emmerdements à n'en plus finir. Bien le merci! Je connais déjà ça. Voyez-vous, monsieur L'Aumône, vous êtes jeune, vous n'avez pas l'air d'un sot, vous allez me comprendre. Figurez-vous qu'à vingt-huit ans j'ai découvert un medicament qui guérissait radicalement la myopie : quelques gouttes dans l'œil, et plus besoin de lunettes. Je peux même vous dire avec quoi je fabriquais ce myopicide : avec la fève de malabar. Donc : quelques gouttes dans l'œil, et plus besoin de lunettes. J'ajoute : plus besoin de oculistes, plus besoin d'opticiens. Donc : tous les oculistes ruines, et tous les opticiens. Eh bien, mon cher monsieur L'Aumône, ça a failli me coûter cher cette histoire : ah là là! la vie. Tout simplement. On a voulu m'assassiner. Parfaitement. Et les marchands d'écaille qui voulaient me couper les oreilles. Quand j'ai compris j'ai enterré mon myopicide et je suis venu me cacher ici où j'exploite tout bêtement et tout bonnement mon élixir. Car supposez que je fasse du foin avec? Eh bien! la même histoire recommencerait. Supposez un instant que je guérisse l'ontalgie existentielle et l'angoisse substantielle et l'épilepsie essentielle, qu'est-ce qu'ils deviendraient les médecins, les théologiens, les pharmaciens, les philosophes, les chirurgiens? Tous ruinés! Tous foutus! Plus de Vatican! Plus de Faculté! Oh mais je les connais, ils ne me laisseraient pas faire dès qu'ils commenceraient à entendre parler de guérison zou ils me feraient disparaître de dessus terre où j'ai bien du plaisir à être surtout en ce moment assis que je suis en face d'une gentille mignonne comme cette enfant.